Discret, voire secret, Alexis Kohler est pourtant l'un des hommes les plus puissants de France. Bras droit d'Emmanuel Macron depuis leur rencontre à Bercy en 2014, il occupe le poste stratégique de secrétaire général de l'Élysée depuis 2017. Mais qui est vraiment cet énarque brillant, amateur de littérature classique et passionné d'économie ? Cet article vous propose un portrait complet d'Alexis Kohler, figure incontournable du pouvoir macroniste.
Jeunesse et formation: les fondations d'un haut fonctionnaire
Né le 1er septembre 1972 à Strasbourg, Alexis Kohler grandit au sein d'une famille alsacienne bourgeoise et catholique. Son père, professeur agrégé d'allemand, et sa mère, professeur d'histoire-géographie, lui transmettent le goût de l'effort et le sens du service public. Après des études secondaires brillantes au lycée Fustel de Coulanges de Strasbourg, il intègre l'une des classes préparatoires les plus prestigieuses de France, le lycée Louis-le-Grand à Paris.
En 1993, il réussit le concours d'entrée à l'École Normale Supérieure (ENS) de la rue d'Ulm, vivier de l'élite intellectuelle française. Il y étudie les sciences économiques et sociales, se passionnant pour les questions de macroéconomie et de politique industrielle. Il parfait ensuite sa formation à l'École Nationale d'Administration (ENA), au sein de la promotion Averroès (1998-2000), dont il sort major. C'est au cours de ces années de formation qu'il se lie d'amitié avec de futures personnalités politiques, notamment Florence Parly et Emmanuel Macron.
Une ascension fulgurante au sein de la haute fonction publique
À sa sortie de l'ENA, Alexis Kohler choisit d'intégrer l'Inspection générale des finances (IGF), un corps prestigieux chargé de contrôler et d'auditer les administrations et les entreprises publiques. Il y gravit rapidement les échelons, se forgeant une réputation d'expert rigoureux et exigeant. Ses missions le conduisent à se pencher sur des sujets aussi divers que la réforme de la SNCF, la régulation du marché de l'électricité ou encore la gestion des retraites.
En 2008, sa carrière prend un tournant international lorsqu'il est nommé représentant de Bercy au Fonds monétaire international (FMI) à Washington. Cette expérience lui permet d'approfondir sa connaissance des rouages de l'économie mondiale et de se familiariser avec les enjeux de la gouvernance internationale. Il y tisse également un réseau de contacts précieux au sein des institutions financières internationales.
La rencontre avec Emmanuel Macron: un tournant décisif
De retour en France en 2012, Alexis Kohler rejoint le cabinet d'Arnaud Montebourg, alors ministre du Redressement productif. Il y retrouve Emmanuel Macron, nommé secrétaire général adjoint de l'Élysée par François Hollande. C'est le début d'une collaboration étroite et fructueuse entre les deux hommes, qui partagent une même vision moderne de l'économie et de l'action publique.
En 2014, Emmanuel Macron est nommé ministre de l'Économie, de l'Industrie et du Numérique. Il n'hésite pas à faire appel à Alexis Kohler pour diriger son cabinet. C'est dans ce rôle clé que ce dernier participe activement à la conception et à la mise en œuvre des réformes économiques du quinquennat Hollande, notamment la loi Macron et le pacte de responsabilité et de solidarité. Il se forge alors une image de réformateur pragmatique, capable de dialoguer avec les partenaires sociaux et de trouver des compromis.
Secrétaire général de l'Élysée: au cœur du pouvoir macroniste
Lorsque Emmanuel Macron se lance dans la course à l'Élysée en 2017, Alexis Kohler est à ses côtés. Il joue un rôle crucial dans l'organisation de la campagne présidentielle, notamment en supervisant la rédaction du programme économique. Après la victoire du candidat En Marche!, il est logiquement nommé secrétaire général de l'Élysée, un poste stratégique qui fait de lui le véritable bras droit du chef de l'État.
À ce titre, Alexis Kohler est responsable du bon fonctionnement de la présidence de la République. Il supervise l'ensemble des services de l'Élysée, coordonne l'action gouvernementale et conseille le président sur les grands dossiers politiques, économiques et sociaux. Sa connaissance fine des rouages de l'État, son expertise économique et sa relation de confiance avec Emmanuel Macron font de lui un acteur incontournable du pouvoir macroniste.
Un haut fonctionnaire discret mais influent
Contrairement à d'autres figures du macronisme, Alexis Kohler cultive la discrétion. Il accorde très peu d'interviews et n'hésite pas à recadrer les ministres qui s'expriment publiquement sans l'aval de l'Élysée. Cette volonté de rester dans l'ombre ne doit pas faire oublier son influence considérable sur les décisions prises par le chef de l'État. Il est considéré comme l'un des principaux architectes de la politique économique menée par Emmanuel Macron, notamment la réforme du code du travail, la baisse de l'impôt sur la fortune (ISF) et la suppression de la taxe d'habitation.
Sa proximité avec le président et son rôle central dans la prise de décision lui valent également des critiques. Certains lui reprochent son manque d'ouverture et son dogmatisme, le jugeant trop attaché à la doxa libérale. D'autres s'inquiètent de son influence grandissante, y voyant le signe d'une dérive technocratique du pouvoir.
Un avenir incertain après l'affaire MSC
En 2019, Alexis Kohler est mis en cause dans l'affaire MSC, du nom d'une compagnie maritime italo-suisse. Soupçonné de prise illégale d'intérêts en raison de ses liens familiaux avec l'armateur, il est mis en examen en septembre 2021. Il conteste fermement les accusations portées contre lui et bénéficie du soutien sans faille d'Emmanuel Macron, qui le maintient à son poste malgré la polémique. L'issue de cette affaire judiciaire est encore incertaine, mais elle a fragilisé Alexis Kohler et pourrait à terme peser sur sa carrière politique.
Conclusion
Alexis Kohler incarne la nouvelle génération de hauts fonctionnaires arrivés au pouvoir avec Emmanuel Macron. Brillant, travailleur et discret, il est devenu un rouage essentiel de la Ve République, participant activement à la définition et à la mise en œuvre de la politique menée par le chef de l'État. Son avenir politique reste toutefois incertain, suspendu à l'issue de l'affaire MSC. Il n'en demeure pas moins que son parcours atypique et son influence sur le pouvoir macroniste continueront de fasciner et de susciter le débat.